Système d'échappement et son de moteur
Le système d’échappement d’un moteur cumule plusieurs fonctions :
- extraire le plus efficacement possible les gaz brûlés des chambres de combustion
en augmentant en même temps le remplissage en gaz frais (effet de balayage) tout en
évitant la sortie des gaz frais à l'échappement avec une contre-pression minimale
- réduire les émissions polluantes (catalyseur, filtre à particules, etc...)
- réduire la température des gaz, la pression et donc le niveau de bruit tout en éliminant
les fréquences de résonance et en produisant un son le plus agréable possible, avec la
meilleure esthétique (ligne d’échappement, avec pot de détente et silencieux)
La directivité du son d'échappement dépend de la plage de fréquences, par exemple sur une moto à l'arrêt : vers le sol en dessous de 250Hz, vers le haut entre 315 et 800Hz, avec en dynamique des différences en fonction du nombre et de la position des échappements.
Plusieurs échappements séparés permettent une légère spacialisation du son avec des différences de temps et d'intensité percues en fonction de la position de l'auditeur.
Sur les 2 temps, pour éviter la sortie des gaz frais par la lumière d'échappement encore ouverte à la fin de la phase de transfert, on utilise un échappement (individuel par cylindre sur motos) à chambre d'expansion ou résonateur (plus couramment désigné pot de détente à contre cône sur les moteurs de compétition avec généralement un silencieux à absorption)
voir site : http://yam2stroke.free.fr/articles/articles-2/techno/detente/detente.htm
L'efficacité de l'échappement dépend du type de silencieux, de la forme, de la longueur, du diamètre et de la surface intérieure des tubulures et silencieux, et de la position et de la forme des raccordements des tubulures.
Il existe différentes méthodes d'atténuation du bruit, pouvant être associées sur une même ligne d'échappement ou dans un même silencieux :
- à réflexion (moteur de série) par chambres d'expansion et chicanes, avec interférences destructives permettant une bonne atténuation des basses fréquences mais augmentant la contre-pression
- à absorption (en compétition) avec tubes perforés et matériau isolant poreux (laine de verre ou de roche ou composite), avec une bonne atténuation des hautes fréquences mais se dégradant avec le temps
- à résonateur de Helmholtz ou à branche latérale, avec chambre de résonance éliminant une fréquence particulière
Sur un monocylindre 4 temps, la pression des gaz au niveau de la soupape d’échappement va se réfléchir au bout de l’échappement en onde de dépression qui devra revenir avant que la soupape ne se ferme pour aider à évacuer les gaz brûlés et à admettre les gaz frais par la soupape d'admission déjà ouverte, ce qui permet un accord d'échappement à régler sur une plage de régime proche de la puissance maxi, avec :
- un gain en remplissage de gaz frais lors de la phase de croisement des soupapes
(ouverture simultanée de l'échappement et de l'admission)
- une baisse de température de fonctionnement
- une diminution du risque de cliquetis permettant d’augmenter la compression et
l’avance à l’allumage
L'accord d'échappement pour un régime donné est lié à la la longueur et forme de la tubulure de sortie, à la durée de croisement des soupapes ainsi qu'à la vitesse du son suivant la température des gaz, celle-ci diminuant en s'éloignant de la soupape d'échappement.
La longueur théorique d'accord de l'échappement est égale à L = C x T / 12N
avec C = vitesse du son en m/s (près de 700 m/s dans le premier tronçon)
T = rotation en degré avant ouverture de l'admission = AOE + 180 - AOA
N = régime de rotation en tr/min
Le calfeutrage externe de la tubulure de sortie avec un matériau réfractaire ou un revêtement céramique facilitera une vitesse des gaz plus élevée, et peut donc augmenter le régime d'accord ou compenser une tubulure trop longue tout en réduisant la température ambiante autour du moteur. Le diamètre de la tubulure et la présence de coude peut également modifier le régime d'accord.
Si la longueur théorique de la ligne d'échappement est trop longue, on peut utiliser une longueur réduite permettant de s'accorder sur l'harmonique 2 voire 3 qui est une onde d'amplitude réduite mais de fréquence 2 voire 3 fois plus élevée.
Un bon accord d'échappement sur une plage de régime large nécessite un compromis dans les dimensions de la tubulure, les hauts régimes nécessitant un diamètre plus important et une longueur plus courte, les bas régimes s'accordant avec un diamètre plus réduit et une longueur plus importante.
Sur les multicylindres 4 temps, un collecteur (exhaust manifold en anglais) réunit en un seul conduit différentes sorties d’échappement et permet à la fois de réduire le poids et l’encombrement du système d’échappement et à niveau de bruit équivalent d’améliorer l’écoulement des gaz par rapport à un échappement séparé par cylindre , en utilisant la sortie des gaz d'un cylindre pour engendrer une dépression à la sortie d'un autre cylindre suivant le couplage réalisé.
L'efficacité du collecteur dépend de la position et de la forme des raccordements des tubulures, et des intervalles d'allumage des cylindres regroupés, les intervalles inégaux entraînant des interférences modifiant la sonorité d'échappement, et réduisant la vitesse d'écoulement lorsque les périodes d'échappement de chaque cylindre se chevauchent.
Le diamètre et la longueur de chaque branche du collecteur doivent être de préférence identique surtout si les cylindres regroupés ont des intervalles d'allumage égaux.
Les motos multicylindres 4 temps de grand prix des années 50/60 avaient généralement des échappement séparés avec mégaphones sans silencieux.
Certaines motos multicylindres 4 temps des années 70 (Honda 750 Four K0, Benelli 750 Sei, etc...) avaient aussi des échappement séparés pour des questions de prestige, d'esthétique, et de sonorité, malgré le rendement moindre, le poids, l'encombrement et le coût supérieur.
Sur les multicylindres à intervalles d'allumage égaux et équipés de colllecteur(s) d'échappement, l'intensité des premiers harmoniques multiples de la fréquence d'explosion diminue en fonction du nombre de cylindres regroupés par collecteur primaire avec une tonalité ressentie plus haute par rapport à un moteur à échappements séparés dont les premiers harmoniques sont d'intensité forte et très proche comme ceux d'un monocylindre.
Voir les excellents articles des sites ci-après :
https://www.formula1-dictionary.net/exhaust_road_perf.html
https://www.formula1-dictionary.net/exhaust.html
https://burnsstainless.com/blogs/articles-1/6-cylinder-and-12-cylinder-exhaust-header-design
http://www.epi-eng.com/piston_engine_technology/exhaust_system_technology.htm
Pour un 4 cylindres en ligne 4 temps classique (à vilebrequin plat), le meilleur compromis couple/puissance est obtenu avec un collecteur de type 4 en 2 en 1 (3 Y) en raccordant d'abord les cylindres dont l’allumage est décalé de 360° (1-4 et 2-3 quel que soit l'ordre d’allumage), mais en moto on trouve aussi des couplages primaires de cylindres 1-2 et 3-4 dont l'allumage est décalé de 180° et 540° (avec appariement dit séquentiel), pour des questions d'encombrement du collecteur, de longueur d'accord à haut régime, de coût, et de sonorité.
Le 4 en 1 permet une meilleure puissance maximale mais sur une plage de régime réduite et plus élevée. Il augmente également le frein moteur grâce à une contre-pression importante.
Voir extrait d'étude ci-après précisant l'évolution de l'intensité des harmoniques liées au cycle moteur complet et à la rotation du moteur, suivant la forme du collecteur (avec spectres harmoniques visibles en recherchant "images" dans Google à partir du titre de l'étude) :
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0003682X17309155
Attention, un collecteur tubulaire d'apparence 4-1 peut en réalité cacher un cloisonnement intérieur au niveau de la jonction des tubulures permettant de séparer les flux par paire avec un fonctionnement proche d'un 4-2-1 3Y.
En moto, on peut avoir d'origine un nombre de silencieux séparés plus important que le nombre de tubulures en aval du collecteur avec le cas échéant un catalyseur unique (échappement 4-2-1-2 ou 4-1-2), ou 4 silencieux séparés sur MV Augusta F4 750 et 1000 non catalysées (échappement 4-2-4 ou 4-2-1-2-4 !).
L'optimisation de la forme du collecteur d’échappement est souvent limitée par l'espace disponible ou la disposition des cylindres.
Sur les moteurs de série à 2 bancs de 2, 3, 4, 5, 6, et 8 cylindres en ligne, le collecteur ne regroupe le plus souvent que des cylindres d'un même banc pour des questions de longueur de tubulures et d'encombrement, même si les intervalles d'allumage sont inégaux sur le même banc mais égaux pour l'ensemble du moteur (cas des 4 cylindres à plat boxer et en V à manetons décalés, et des V8 à vilebrequin crossplane), avec un accord d'échappement d'autant plus difficile si on a un collecteur asymétrique avec des tubulures de longueurs inégales, ce qui peut être le cas également sur un moteur en ligne à intervalles d'allumage égaux, par exemple moto BMW K 100 des années 80, ou Renault R5 GT Turbo, avec peut-être dans ce dernier cas l'avantage d'une réduction du temps de réponse du turbo par une longueur très réduite de tubulure sur les 2 cylindres les plus proches, au détriment de l'accord d'échappement, comme sur certains 4 cylindres boxer turbo (Subaru Impreza et Porsche 718).
D'une manière générale, l'optimisation de la forme du collecteur est moins nécessaire sur les moteurs suralimentés avec une pression d'admission plus importante qui s'oppose plus facilement à la contre-pression d'échappement, avec en revanche sur les moteurs de série turbocompressés la nécessité de réduire le temps de réponse à la remise des gaz à bas régime, donc de limiter la longueur des tubulures en amont de la turbine.
Chaque collecteur regroupe généralement 5 cylindres maximum, ce qui nécessite 2 collecteurs sur chaque rangée de 6 et 8 cylindres en ligne.
Sur tous les moteurs dont le nombre de cylindres est multiple de 2 ou 3, on peut avoir différents regroupements des tubulures d'échappement avec des sonorités légèrement différentes pour un nombre de cylindres identique car se rapprochant de la tonalité correspondant à celle liée aux cylindres couplés sur chaque collecteur primaire (ou à celle d'un monocylindre avec des échappements séparés !) si les longueurs de tubulures sont identiques, suivant exemples ci-après :
-- Sur 6 (et 12 cylindres) :
- échappement à 2 collecteurs primaires regroupant chacun 3 cylindres juxtaposés à intervalles d'allumage égaux de 240° (le plus utilisé) :
. échappement 6-2 (moto, banc de V12 F1 en général)
. échappement 6-2-1 (banc de V12 F1 Honda V12 RA121/122 et divers)
. échappement 6-2-1-2
- échappement 6 en 1 (certains 6 et 12 cylindres de compétition)
- échappement 6-3 sans catalyseur à 3 collecteurs primaires 2-1 nécessitant de longs tubes et regroupant chacun 2 cylindres à intervalles d'allumage égaux de 360° (sur anciens 6 cylindres Triumph et sur chaque banc du V12 Matra F1 type MS11 de 1968)
- 6 échappements séparés sans catalyseur (chaque banc du V12 arrière de l'Auto Union type D de 1938-39, motos 6 cylindres des années 60/70 : Honda 250 RC166 de Grand Prix 1966 et Benelli 750 Sei de 1973)
-- Sur V8 à vilebrequin crossplane :
- échappement avec un collecteur primaire 4-1 par banc regroupant 4 cylindres à intervalles d'allumage inégaux de 270°-180°-90°-180° (le plus simple, avec souvent des tubulures de longueurs inégales)
- échappement avec un collecteur 4-2-1 de géométrie différente pour chaque banc avec couplage primaire par paires de cylindres 1-3 et 2-4 à intervalles d'allumage inégaux de 270°-450° (évite le couplage primaire avec un intervalle d'allumage de 90°-540°, utilisé entre autres sur AUDI et Rover)
- 2 échappements 4-1 dits "bundle of snakes" (noeud de serpents), regroupant chacun 2 cylindres de chaque banc, avec 4 intervalles d'allumage égaux de 180° (évite le couplage primaire avec un intervalle d'allumage de 90°-540°), utilisé sur Ford GT 40 de course et sur moteur de Formule 1 Coventry Climax FWMV Mk1 et Mk2 des années 60.
- 8 échappements séparés sans catalyseur ni silencieux (premières versions du V8 1,5 l BRM P56 de Formule 1 des années 60, avec tuyaux d'échappements presque verticaux appelés "stack pipe" et similaires à ceux des Auto Union de course des années 30 à moteurs arrière V16 et V12.
Sur les moteurs avec banc(s) à nombre impair de cylindres, on peut avoir aussi un couplage primaire par paire de cylindres comme sur le V10 à 90° FSI d'Audi avec manetons décalés qui a sur chaque banc un ordre d'allumage 1-5-2-3-4 avec couplage primaire des cylindres 1-2 et 4-5, avec un regroupement ensuite du cylindre 3 avec la paire 1-2, ceci pour éviter un chevauchement trop important des phases d'échappement tout en réduisant les longueurs primaires pour la mise en température rapide des catalyseurs 1-2-3 et 4-5, et une diminution de l'encombrement (voir document SSP 376).
On ajoute parfois des jonctions d'équilibrage entre tubulures qui permettent d'améliorer l'efficacité et le son de l'échappement surtout si les intervalles d'allumage sont inégaux entre les cylindres raccordés au même collecteur ou sur l'ensemble des cylindres.
Avant le silencieux arrière d'une voiture, on trouve généralement un silencieux central qui est aussi un résonateur de Helmholtz éliminant les fréquences indésirables. Les jonctions d'équilibrage peuvent s'associer ou se substituer à ce silencieux central et améliorer la puissance à haut régime en diminuant la contre-pression avec un son plus aigu (X pipe) ou favoriser le couple à bas régime avec un son plus grave (H pipe), par rapport à une jonction classique en Y (Y pipe).
En automobile, sur les moteurs les plus récents (par ex Honda), le collecteur d'échappement (exhaust manifold) est remplacé par une sortie unique avec regroupement des conduits directement dans la culasse (headifold), permettant une mise en température plus rapide, un meilleur refroidissement et une diminution du poids et de l'encombrement.
Certains échappements sont équipés de valves permettant de réduire le passage des gaz à bas et moyens régimes pour réduire le bruit et améliorer le couple, ou au contraire pour libérer l'échappement à des régimes plus élevés que ceux prévus pour le contrôle du volume sonore d'homologation (par exemple sur anciennes motos Yamaha, système EXUP en 4 temps et YPVS en 2 temps).
Sur motos 4 temps, certains systèmes à valves rotatives modifient en plus le couplage des cylindres, la longueur et le débit des tubulures, en accord avec un système d'admission pouvant être variable également.
Système EGCV Honda (admission H-VIX et échappement H-TEV) qui correspond à peu près à un collecteur 3Y avec différents couplages de cylindres :
- à bas régime 1-2 et 3-4 mais avec parcours moins direct pour 1 et 4, longueur
réduite pour les branches initiales et allongée pour le tuyau de liaison au
silencieux, avec jonction sur la tubulure non utilisée !
- à moyen régime 1-4 et 2-3
- à haut régime 1-4 et 2-3 mais avec jonctions 1-2 et 3-4
SET Suzuki qui comprend un collecteur 3Y avec couplage 1-2 et 3-4 mais avec jonctions entre 1-4 et 2-3 contrôlées simultanément par valves rotatives :
Voir vidéos ci-après reprenant les différentes géométries d'échappement sur moteurs 4 temps et les sonorités associées :